Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/22

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voir qu’il fut un grand journaliste, le plus violent, le plus éloquent et le plus spirituel des « ultramontains », et qu’il a laissé une page curieuse sur Thérésa. Je pourrais vous répondre simplement que je continue à me laisser apporter mes sujets par le hasard de mes curiosités ou de mes souvenirs… (Hélas ! je sens que je glisse encore dans cette « critique personnelle » qu’on m’a tant reprochée ; mais qu’y faire ?) Donc, les premiers volumes que j’ai reçus comme « livres de prix », c’était Rome et Lorette et les Pèlerinages de Suisse ; et ainsi j’eus de bonne heure ce pli de considérer Veuillot comme un grand homme. Enfant et adolescent, j’ai fréquenté des curés de campagne qui ne juraient que par lui, et pour qui le rédacteur en chef de l’Univers était le Judas Macchabée de notre âge. Et, comme ils l’aimaient et l’admiraient un peu en cachette de leur évêque, ce culte qu’ils me faisaient partager avait pour moi l’attrait de quelque chose de vaguement défendu ; et le Macchabée catholique m’apparaissait avec le prestige d’un héros réfractaire, d’un outlaw, suspect aux puissances établies. Innocente perversité ! J’avais pour Veuillot d’autant plus de considération que je savais qu’il était redoutable à Mgr Dupanloup, lequel m’avait « confirmé ». Ces impressions-là ne s’oublient point.

Mais au reste Louis Veuillot nous est tout à coup redevenu « actuel ». Naguère deux des plus anciens rédacteurs de l’Univers se retiraient du