Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/66

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liberté que ce « jésuite », ce « sacristain », ce suppôt de la tyrannie de l’Église. Il a arraché beaucoup de masques, que sans doute on a remis depuis, mais qui ne tiennent plus aussi bien. Il lui a été excellent d’être un vaincu et, dans quelques circonstances, un persécuté : cela lui a donné beaucoup d’idées, et de fort belles. Nombre de ses invectives sont reprises aujourd’hui par des hommes très éloignés de lui par leur foi. Contre le régime de centralisation à outrance issu de la Révolution et de l’Empire, contre l’esprit jacobin, la tyrannie de l’État, la bureaucratie, les chinoiseries administratives, et contre ce qu’il y a, dans l’individualisme moderne, de funeste à la démocratie même, il abonde en magnanimes fureurs et en sarcasmes clairvoyants. On pourrait presque dire qu’il a répandu dans ses articles et ses pamphlets ce que Taine devait ordonner en un corps de théorie dans les derniers volumes de ses Origines de la France contemporaine.

Et Taine eût approuvé, dans son ensemble, le « projet de constitution » que Veuillot écrivit un jour pendant le siège de Paris. À mon avis, Veuillot s’y révèle grand libéral (au sens vrai de ce malheureux mot), bon philosophe, bon psychologue. Il considère la France comme un organisme vivant et qui a un passé. Sa « solution » est exactement le contraire de la solution jacobine et napoléonienne. Tout ce projet est à lire et à méditer. En voici quelques paragraphes :