Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/225

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Ainsi, cette épreuve des brimades est comme la sanctification du Tchin par la souffrance volontaire. Ce serait beau en son genre, si ce n’était funeste.

L’esprit d’école me semble, ici, mauvais, parce que c’est, ici, l’esprit d’un groupe artificiel, et qu’il est moins efficace pour ceux qui sont de ce groupe que contre ceux, bien plus nombreux, qui n’en sont pas. Au surplus, il nuit à ceux même qui « en sont ». Il les remplit d’illusions sur leur propre mérite ; il les emprisonne ; il risque de leur enlever à jamais le sens et l’intelligence de la réalité et de faire d’eux, pour toute la vie, des écoliers, — tout flambants du prestige emprunté de l’École, mais des écoliers.

Les brimades de l’X, qui sont la manifestation la plus brutale de cet esprit-là, sont donc condamnables deux fois. Et elles le sont trois fois, si, comme on me l’affirme, ces sauvageries ont disparu de Saint-Cyr et même des régiments et si l’École polytechnique en maintient seule l’odieuse tradition.

On m’objectera l’École normale. Je tâche de n’en avoir pas la superstition. J’ai rencontré tant d’hommes supérieurs et originaux qui n’en sortaient pas ! Je l’aime simplement comme on aime sa jeunesse. Je crois d’ailleurs que, si les amitiés y sont fortes, la « camaraderie » proprement dite y est moindre qu’à l’X. Les mœurs enfin y sont joviales, sans férocité. J’atteste qu’il y a vingt-cinq ans les brimades y