Page:Lemaistre de Sacy - La sainte Bible, Furne, 1841, vol 3.djvu/452

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dans les villes prochaines des Gentils, pour les obliger d’agir de la même sorte contre les Juifs, et de les contraindre à sacrifier ;

9. Ou de tuer ceux qui ne voudraient point embrasser les coutumes des Gentils. Ainsi on ne voyait que misère.

10. Car deux femmes ayant été accusées d’avoir circoncis leurs enfants, furent menées publiquement par toute la ville, ayant ces enfants pendus à leurs mamelles, et ensuite précipitées du haut des murailles.

11. D’autres s’étant assemblés en des cavernes voisines, et y célébrant secrètement le jour du sabbat, comme Philippe en fut averti, il les fit tous consumer par les flammes, n’ayant osé se défendre à cause du grand respect qu’ils avaient pour l’observation du sabbat.

12. Je conjure ceux qui liront ce livre de ne se scandaliser point de tant d’horribles malheurs, mais de considérer que tous ces maux sont arrivés, non pour perdre, mais pour-châtier notre nation.

13. Car c’est la marque d’une grande miséricorde de Dieu envers les pécheurs, de ne les laisser pas longtemps vivre selon leurs désirs, mais de les châtier promptement.

14. En effet, le Seigneur n’agit pas à notre égard comme à l’égard des autres nations, qu’il souffre avec patience, se réservant à les punir dans la plénitude de leurs péchés, lorsque le jour du jugement sera arrivé ;

15. Et il n’attend pas de même, pour nous punir, que nos péchés soient montés à leur comble.

16. Ainsi il ne retire jamais sa miséricorde de dessus nous ; et parmi les maux dont il afflige son peuple pour le châtier, il ne l’abandonne point.

17. Après avoir dit ce peu de paroles pour l’instruction des lecteurs, il faut reprendre maintenant ma narration.

18. Éléazar, l’un des premiers docteurs de la loi, qui était un vieillard d’un visage vénérable, fut pressé de manger de la chair de pourceau, et on voulait l’y contraindre en lui ouvrant la bouche par force.

19. Mais lui, préférant une mort pleine de gloire à une vie criminelle, alla volontairement et de lui-même au supplice.

20. Considérant ce qu’il lui faudrait souffrir en cette rencontre, et demeurant ferme dans la patience, il résolut de ne rien faire contre la loi pour l’amour de la vie.

21. Ceux qui étaient présents, touchés d’une injuste compassion, à cause de l’ancienne amitié qu’ils avaient pour lui, le prirent à part, et le supplièrent de trouver bon qu’on lui apportât des viandes dont il lui était permis de manger, afin qu’on pût feindre qu’il avait mangé des viandes du sacrifice, selon le commandement du roi,

22. Et qu’on le sauvât ainsi de la mort : ils usaient donc de cette espèce d’humanité à son égard par un effet de l’ancienne affection qu’ils lui portaient.

23. Mais pour lui il commença à considérer ce que demandaient de lui un âge et une vieillesse si vénérable, ces cheveux blancs qui accompagnaient la grandeur d’âme qui lui était naturelle, et cette vie innocente et sans tache qu’il avait menée depuis son enfance ; et il répondit aussitôt, selon les ordonnances de la loi sainte établie de Dieu, qu’il aimait mieux descendre dans le tombeau.

24. Car il n’est pas digne de l’âge où nous sommes, leur dit-il, d’user de cette fiction, qui serait cause que plusieurs jeunes hommes, s’imaginant qu’Éléazar, à l’âge de quatre-vingt-dix ans, aurait passé de la vie des Juifs à celle des païens,

25. Seraient eux-mêmes trompés par cette feinte dont j’aurais usé pour con-