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Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t2, 1887.djvu/297

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ARMAND RENAUD.


CAMÉLIAS



Mon amour, tu te plains qu’avec le coloris
Dont les camélias décorent leur pétale,
Ils n’offrent nulle odeur à l’amateur surpris
Qui rêvait un parfum d’essence orientale.

Ayant de leur éclat admiré tout le prix,
Tu n’en gémis que plus de cette loi fatale
Qui sur le rossignol jette un plumage gris,
Et qui veut que, plein d’or, le paon rauque s’étale.

Moi, je suis plus heureux. Depuis le soir si doux,
Où, dans l’oubli profond du monde autour de nous,
J’ai respiré ces fleurs à tes cheveux unies,

Elles ont pour mon cœur des douceurs infinies,
Et, réveillant en moi les souvenirs aimés,
Tous les camélias me semblent parfumés.







L’HIRONDELLE BLESSÉE





J’étais allé chasser sur le bord de la mer.
Libre et seul, enivré de marcher au grand air,
Je regardais le flot s’arrêter sur la rive,
D’après l’ordre éternel qui de l’espace arrive.
À la bouche du fleuve où nagent les saumons,
Entre les rochers gris couverts de goémons,
J’allais, et je laissais entrer dans ma poitrine
Ce souffle âcrement pur, cette senteur marine
Qui colorait ma joue et qui me rendait fort.