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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Au poids des écheveaux usés
J’avais mesuré ma pensée,
Sereine entre les fils brisés
Et chaque fois recommencée.

Aussi le feuillage menu,
Les points nombreux de la fleur plate
Gardent mon rêve retenu
Tout blanc parmi la toile mate.

Que l’enfant qui joue au soleil,
A la douceur de sa parure,
De l’été chantant et vermeil
Reconnaisse la chaleur pure,

Le charme d’un jour bien rempli,
Des heures longues écoulées,
Avec la hâte de l’oubli,
Sur le sable uni des allées.

Maintenant que j’ai terminé,
Tout autour de moi s’éparpille,
Noué, cassé, disséminé,
Le fil tombé de mon aiguille.

Je voudrais que, faisant son nid,
Un oiseau prévoyant ramasse
Ces brins de mon travail fini,
Aux siens les tresse et les enlace,

Comme un lien souple et léger,
Entre le duvet et la mousse,
Juste assez fort pour protéger
L’aile impatiente qui pousse.


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