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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.



AFFINITÉS




J’ai ton sourire, on me l’a dit ;
Tu me l’auras donné toi-même,
Et mon visage en resplendit.
Mais comment cacher que je t’aime
Si ma lèvre a parlé, quand même
Le respect me l’eût interdit.

Les regards au fond des prunelles
Pénètrent si profondément
Qu’en un échange d’étincelles,
L’amante se lie à l’amant,
Par le mystérieux aimant
Des affinités éternelles.

Et nous absorbant sans retour,
Cette pénétration lente
Des traits qu’illumine l’amour
Les réfléchit en nous, brûlante,
Comme sur la pâleur tremblante
D’une rose, l’éclat du jour.

Et ces cœurs au même sourire,
Parmi les regards étrangers,
Se retrouvant, sans se le dire,
Comme des papillons légers,
Deux à deux, s’en vont au martyre
À travers les mêmes dangers.

Mais ce sourire humain des âmes,
Qui rapprochait nos pauvres morts,
N’a pas brûlé toutes ses flammes :