Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/355

La bibliothèque libre.
Cette page n’est pas destinée à être corrigée.

291

ADAM ET ÉVE

vie comme un sacrifice surhumain. C’était l’agonie divine dans la douleur et la volupté, comme si vraiment je m’immolais dans le don de ma force et de mon sang mâle. Un effrayant vertige d’éternité passait, toute la durée des races dans une seconde mortelle et délicieuse entre deux abîmes. Et j’avais cessé de vivre ; elle me tenait expiré au creux de sa molle et chaude poitrine. Et ensuite len* tement je renaissais de la mort comme après l’amour il vient un petit enfant. Amour ! Amour ! es-tu autre chose, que le passage de la mort à la vie et l’infinie renaissance ? Je ne finissais pas de désirer Ève et sitôt que le nourrisson quittait son lait, elle aussi était reprise du goût de l’amour et me don­ nait ses beaux seins.gonflés. Nous n’étions jamais las de nous aimer. L’aurore et les nuits étaient une fête autour de ses grâces. Je ve­ nais comme un jeune roi et m’enveloppais du manteau somptueux de ses cheveux. Une fois, comme Héli et Abel et Stella aussi étaient avec nous, elle déroula cette toison d’or et de soie, et de larges gouttes de pluie crépitaient


UooQle