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Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/167

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leurs déjections, n’étant pas balayées, séchaient au soleil ou se diluaient sous l’averse, jusqu’au lendemain.

Bientôt une surprise arriva aux Colasse : la Pidoux inopinément avait cessé de leur crier sa terrible malédiction. Et ils en demeuraient gênés, comme d’une habitude rompue, cette injure matinale manquant à leur journée. D’abord ils crurent que la Joanne désarmait ; mais la défiance les ayant repris, ils conçurent l’idée vague d’une ruse, ils ne savaient laquelle. Et, en effet, la Pidoux avait son plan, une semence lentement germée dans le terreau de sa fureur. Rentré au logis, Pierre s’asseyait sur la dalle du seuil, mangeant là, dans le soir pacifique, un croûton de pain, arrosé d’une passée de chicorée. De derrière son rideau, elle ne lâcha plus de l’œil le quignon, en un guet tranquille, sûre que l’heure sonnerait, des épingles entre les dents, invisible. Durant l’août entier, sa forme noire revint à chaque vesprée se planter contre le carreau ; mais le moment tardait ; et elle ne sentait