Page:Lemonnier - Gros, Laurens.djvu/114

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partie de l’art plus interdite que d’autres à la médiocrité. » « Non pas, continue Delacroix, qu’il soit difficile de les imaginer, mais la difficulté consiste à les rendre clairement et sans puérilité ».

On pourrait aller un peu plus loin encore et ajouter que Gros cherche aussi dans la peinture l’expression d’idées ou de sentiments. Un tableau est pour lui une démonstration figurée et il y introduit volontiers des intentions. Par exemple, il enfoncera fortement dans le sol la pointe du sabre nu que tient le général Fournier-Sarlovèze, au moment où il refuse de capituler dans Lugo. S’il figure le général de La Riboisière[1], au commencement de la bataille de la Moskowa, recevant les adieux de son fils, qui va partir au combat où il doit mourir, il introduit dans un coin du tableau quatre trompettes sonnant l’appel, qui prend ainsi pour le spectateur quelque chose de funèbre. Et l’œuvre est alors belle d’une beauté particulière. S’il fait le portrait de la première femme de Lucien Bonaparte, il la place dans un bosquet mélancolique, où coule un ruisseau rapide, qui emporte une rose tombée de son corsage.

Dans le tableau de la Capitulation de Madrid, où il représente les Espagnols implorant Napoléon pour qu’il évite à la capitale les horreurs du bombardement, il introduit à gauche un canonnier français brandissant une

  1. Musée d’artillerie. Don du comte F. de La Riboisière, qui nous a très obligeamment fait voir chez lui un remarquable portrait par Gros de son aïeul maternel, le comte Roy, ministre des finances de la Restauration.