Page:Lemonnier - Gros, Laurens.djvu/125

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— il est vrai qu’il était officier d’état-major en même temps qu’artiste — a soin d’écrire au bas de ses tableaux : « Lejeune vidit et pinxit. »

Gros n’avait pas vu les actions qu’il peignit, mais il avait vu la guerre, nous l’avons dit ; il avait assisté à des combats, à des engagements, et son imagination fit passer ses impressions dans quelques-unes de ses œuvres. De là vient la vie intense qui les anime et qui est encore autre chose que l’exactitude. Le Combat de Nazareth est à cet égard une des toiles les plus saisissantes où un artiste ait représenté la « mêlée ». Le grand groupe de droite, où les masses s’entrechoquent si tactiquement et si farouchement, où les mouvements d’ensemble des deux troupes ennemies sont si puissamment notés, au travers des épisodes de combats singuliers, est certainement un des tableaux qui donnent le plus la sensation de la guerre au temps de la Révolution et de l’Empire. Si l’on y ajoute le paysage, la couleur, on reconnaîtra que cette œuvre annonce quelque chose de la peinture moderne et « découvre la genèse des efforts qui vont suivre »[1].

VII

Gros fut donc un précurseur, sans le vouloir, et les deux grands novateurs du début du XIXe siècle, Géricault et


  1. Roger Marx, Études sur l’École française, 1903.