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potence au milieu, et bordée, du côté des anciennes douves, par les restes d’un mur que bastionnait un porche en pierre, aux piliers trapus, couronnés d’un tympan d’armoiries à peine visibles encore sous l’or moussu des lichens. Une arche, jetée par-dessus le fossé, reliait l’immense terre-plein à la berne extérieure. Depuis dix ans, les douves n’avaient plus été curées : aux fortes pluies, elles s’emplissaient d’eaux lourdes : des saules, des osiers, des orties pêle-mêle avaient poussé sur les bords.

Cependant, du côté de la façade ouest, l’ancien lit s’excavait, plus profond. Au temps des derniers fermiers, les bestiaux, en descendant s’y abreuver, avaient même, sous leur piétinement continu, à la longue abaissé la berge et une large mare s’était formée où Jumasse, quelquefois, à la fourche, allait piquer des anguilles. Maintenant, il n’y venait plus que les porcs, à la garde d’Adelin, le petit porcher, ou la vache de la Guilleminette menée par Jaja. Il y avait près d’un an que la leur avait crevé de tympanite.

Jean-Norbert, oblique et furtif, fit le tour du château, regardant les dégâts qu’avait faits l’ouragan de la nuit. Tout en marchant, il épiait si le baron n’allait pas apparaître à l’une de ses dix fenêtres. Une gouttière avait été arrachée ; un pan du toit béait à nu, défoncé ; des débris