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Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/279

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mis dans les poches et je l’ai mis tiédir dans l’eau d’une gamelle. Oh ! comme c’était bon, ma chère femme. Je voudrais bien être avec toi au coin du feu, près de la bonne maman que j’embrasse de tout mon cœur. Il faudra, ma chère femme, payer de suite la traite du banquier Von… J’ai consulté hier mon carnet et j’ai vu que l’échéance est là. Si tu n’a pas assez d’argent, va le voir ; c’est un bon homme, tu le prieras de remettre l’échéance à trois mois. Je pense nuit et jour à vous tous, à ma petite Minna chérie, oui, oui, à tout le monde et même à la vieille Lotte qui fait de si bonnes fricassées aux prunes. Je crois que cela va finir, car nous sommes fatigués on ne peut plus et les Français ont ce qu’ils méritaient. Quand je t’ai écrit avant-hier que Ludwig K… se rétablirait, je me trompais. Ludwig est mort ce matin. Je lui ai coupé des cheveux pour sa mère. C’est la pauvre Hélène qui en pleurera ! S’il y a moyen, ma bonne femme, prépare-les à cette grande douleur. Moi, j’aurai tant de monde à préparer quand je reviendrai. Mon pied va bien à présent ;