Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/324

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phane ! Il fait un temps ! sûrement nous aurons de la neige pour le jour de l’an.

Et elle ajouta, en se tapotant les anglaises d’un petit geste délié et heureux :

— C’est égal. Je suis contente pour cette pauvre Clotilde. Mon cher garçon, je vous ai apporté du bonbon. Allez me prendre mon cabas.


VI


Le mercredi suivant, juste le lendemain du jour de l’an, les trois amies se firent chez ma tante leurs compliments de bonne année : on prit, ce soir-là, après le thé, du vin chaud, et le vin chaud fut suivi d’un punch qui flamba, pendant cinq bonnes minutes, dans l’obscurité de la chambre, sous la vague clarté du carcel dont la mèche avait été baissée.

Madame Peulleke montra toute la soirée une sensibilité et une distraction vraiment intéressantes : dans la même minute sa grosse et luisante figure rose passait du rire aux larmes. Madame Spring, de son côté, fit paraître tant de chagrin, à cause des étrennes que lui avait données M. Spring, qu’elle but positivement un petit coup de trop. Mais madame Dubois, toujours sévère, ne voulut toucher ni au punch ni au vin chaud. Quant à ma bonne tante, elle raconta des histoires de nouvel an passés, expliqua comment elle aurait épousé, si elle l’avait voulu, un monsieur le baron de Quatrebras, qui était manchot, mais possédait 50,000 francs de rentes, et bouda, caressa, caressa, bouda madame Dubois avec une bizarrerie d’humeur qui frappa tout le monde.