Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/338

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» Oh ! elle aurait été bonne mère ! Elle aurait donné à son enfant tout l’amour qui remplissait son cœur et dont s’emparèrent des hommes indignes. Elle aimait si bien, si profondément ! Elle aimait tant à aimer, Stéphane ! Je le vis bien ce soir-là ; ses mains, son corps, sa bouche n’étaient qu’une caresse. C’était plus fort qu’elle ; comme le feu perce toujours la fumée, des baisers, de l’amour, des caresses sortaient d’elle, comme ceux qu’on donne à un petit enfant.

» Mais qu’est-ce que je vous raconte là, Stéphane ? Ni moi ni vous ne comprenons rien à ces choses-là et Lisbeth était un peu effrayée par moments, ne les comprenant peut-être plus. »

Ici ma tante s’interrompit de nouveau pour tousser.

« — Ne trouvez-vous pas, Stéphane, que le froid commence à monter dans la chambre ? Jetez une pelletée de charbon sur le feu, mon garçon. »

Je chargeai le poêle, comme elle me le demandait, et quand elle se fut passé trois ou quatre fois les mains l’une sur l’autre, elle reprit son histoire.


VII


« — Qu’est-ce que je vous disais ? Ah ! je sais. C’est de Clotilde que je parlais. Figurez-vous, garçon, que je l’ai vue à ses pieds, oui, blottie contre elle, toute petite, et disant :

» — Pourquoi ne peut-on pas choisir l’heure de sa fin, Élisabeth ? Tenez, ce serait à présent la mienne. Ma tête entre tes genoux, comme ceci. Ah ! quel bonheur !