Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/184

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle finit par accepter un peu de groseille dans de l’eau. Il la servit lui-même, puis les laissa, sous prétexte de passer ses souliers.

La chambre était vulgaire et sans coquetterie. Il était facile de voir qu’une main de vieille femme touchait seule aux objets dans la maison. Des chaises à fond de paille étaient alignées contre le mur, tapissé d’un papier de tenture décollé par l’humidité le long des plinthes et éraflé par le dossier des chaises, un peu plus haut. Un paravent s’encadrait dans les montants de la cheminée, avec une peinture représentant un ours blanc se préparant à fondre sur deux chasseurs. La cheminée était moderne, en bois imitant le marbre, et elle avait pour ornement une glace à bordure de palissandre, une pendule en zinc bronzé et deux coquillages énormes, étalant leur valves rouges comme des entonnoirs. Une table recouverte d’un tapis de toile cirée, une armoire à linge peinte en rouge, une autre armoire-buffet en acajou, chargée de vaisselle, complétaient l’ameublement.

Ils regardaient les coquillages, le paravent, la glace, leurs mains posées sur leurs genoux, sans rien dire. Le même silence continuait à régner dans la maison. Et tout à coup ils entendirent un bruit de discussion qui venait de l’étage. Ils reconnurent la voix du fermier, et une autre voix lui répondait, avec aigreur. Cela dura quelques instants, puis Hayot descendit.

Il avait mis une veste de coton à rayures bleues et grises, toute raide d’amidon, avec des luisants de repassage dans le dos et aux manches, et il se frottait les mains, l’air gai.

— Les garçons sont chez Machard, dit-il. J’vas leur faire dire de venir. Vous connaissez bien les Machard ?

Ils les connaissaient sans les connaître.

Il cligna des yeux et continua :