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Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/262

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Malplaquet commençait à faiblir.

— Hardi ! hardi ! criait-il aux forestiers, sentant la crampe mordre ses doigts.

Bayonnet, à demi-détraqué, fit un effort, se traîna jusqu’à Cachaprès, lui jeta son poing en travers des yeux. Un étourdissement paralysa le rude gars, pendant un moment. Et Malplaquet, à bout de forces, hurla à l’aide, du côté de Bastogne, qui arrivait à son tour. Ses mains se détendaient comme un ressort usé ; il sentait, à d’irrésistibles mouvements du corps qu’il avait dompté jusqu’alors, son redressement prochain, et brusquement, Cachaprès s’affala sur le sol, de tout son poids, entraînant Malplaquet avec lui. Le forestier lâcha prise.

Il y eut un pêle-mêle. Cachaprès se roulait sur le sol, avec des soubresauts terribles, frappant de la tête comme un bélier et ruant comme un onagre, culbutant les gardes l’un après l’autre, par moments étouffé sous eux, la face contre terre, et mordu par leurs dents, étranglé par leurs doigts, couturé, échardé, saignant. Des cris haletants sortaient des poitrines, mêlés au choc continu des corps bondissant sur la terre élastique.

Cette bête à trois dos se convulsionnait, par saccades, avec des enlacements de jambes et de bras, où les corps se brouillaient, s’emmanchaient, avaient l’air d’une bouillie de chairs pantelantes.

Cachaprès se démenait dans le tas, employant toutes les ruses, pareil au sanglier harcelé par les meutes. Bastogne reçut un coup de tête qui le mit hors de lutte. Bayonnet fut aveuglé d’un coup de fourchette traîtreusement porté, et de nouveau le braconnier se trouva seul en présence de Malplaquet.

Une férocité s’empara de lui : une roue de feu tournait dans ses moelles ; il glissa la main à sa poche, en tira son couteau qu’il ouvrit au large, et plongea la lame dans les