Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/153

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minutes avant sept heures, et tout le personnel féminin se trouvait sous les armes dans le salon d’attente à la rentrée des promeneurs.

Entre temps, Mr Eugène Guérineau avait discrètement glissé dans l’oreille de son camarade l’indication suivante :

— Dans cette bienheureuse maison tout hospitalière, quand on dîne, on ne parle jamais de politique, la politique étant ce qui nous divise le plus ; jamais de religion, les questions religieuses étant ce qui nous rapproche le moins.

Quand on annonça : « Madame est servie », la maîtresse de la maison prit le bras de l’avocat, Georges Paulet offrit le sien à Mlle Thérèse, et les deux amis se trouvèrent presque en face l’un de l’autre, à une table où il n’y avait guère qu’une vingtaine de couverts pour les parents et amis de la famille.

Comme tous les convives avaient bel appétit et se disposaient à faire honneur au dîner, le bruit des cuillers sur les assiettes ne fut pas interrompu dans son premier roulement ; mais, le potage enlevé et les petits verres de vin blanc versés, les langues commencèrent à se délier.

— Reconnaissez-vous ce vin-là, docteur ? fit Desmarennes de sa bonne voix joyeuse.

Le docteur prit une seconde gorgée et fronça le sourcil rêveusement.