Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/322

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et trop parleurs ; trop prosaïques, les commerçants et les industriels ; en somme, tous ces gens-là beaucoup trop intéressés et trop désireux de la grosse dot de la belle fille aux yeux d’or plutôt que vraiment amoureux de Mlle d’Évran. Grâce à Dieu et à son esprit, elle a su se garer de la marée montante, pour se donner le temps de réfléchir et de choisir à son gré ; il est probable qu’elle voudra simplement de quelqu’un qui la prendra pour elle-même, et qui, sans être précisément un Narcisse de beauté, sera capable d’apprécier sa rare valeur de femme, un homme ayant la fierté du caractère et la richesse du cœur ; ce qui n’est pas si facile à trouver qu’on pourrait le croire, aujourd’hui surtout.

— Elle a raison, parfaitement raison, dit Albert ; je comprends mademoiselle d’Évran et l’approuve de tous points. Mais avoue, Germaine, que sa fortune la rend inabordable, et fera sans doute reculer ceux qui seraient peut-être dignes d’elle, et qui, l’aimant comme elle mérite de l’être, se tairont… n’oseront jamais…

— Ils auront tort, ceux-là, repartit vivement Germaine. Tenez, permettez-moi de vous le dire ; je vous connais mieux que vous-même, mon pauvre monsieur Albert. Eh bien, avec votre caractère de rêveur, vous n’arriverez