Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/326

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blanche qu’elle avait baptisée du nom d’Hermine.

Quand les dernières maisons du bourg furent bien loin derrière eux, lorsque, après un galop rapide, ils entrèrent sous bois et se trouvèrent bien seuls, on eût dit que les chevaux comprenaient la pensée de leurs maîtres ; ils se mirent au pas, et quand leurs têtes fines se rapprochaient, le petit Noir mordillait à dents câlines la crinière blanche d’Hermine, avec un hennissement clair, qui parfois faisait sourire l’amazone et le cavalier. Tous deux avaient tant de choses à se dire qu’ils gardaient un silence profond. L’automne était doux comme un printemps, si doux que, se trompant de saison, quelques églantiers avaient refleuri. Apercevant une touffe de ces rosiers sauvages :

— Ah ! les belles fleurs, dit Alise.

Elle voulut en avoir aussitôt, et quitta l’étrier… Tous deux arrivèrent ensemble au buisson de roses. Il n’en resta pas une sur la haie. Quand il fallut remonter sur Hermine, Albert fit un marchepied de sa main à mademoiselle d’Évran, elle accepta de bonne grâce et s’enleva toute légère en se prenant à la crinière blanche.

Mais quand Albert eut dans sa main ce petit pied de fée, chaussé de gris, petit pied fin bien arqué, spirituel et tout ému, dont il voyait