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la triomphatrice

qu’en me servant il me faisait une grâce. Ce prince-consort auprès de moi, avait son royaume ailleurs… et vous le lui démembrez, vous le contestez, vous le jugez, vous l’humiliez ! Il faudrait que Sorrèze n’ait aucune dignité pour ne pas souffrir… C’est ce qu’il y a de noble en lui qui se révolte… Il a maintenant des réserves, il m’accueille comme une femme qui trahirait, comme une femme dont on n’est pas sûr !…

Flahaut.

J’imagine qu’il n’est pourtant pas jaloux de vous ?

Claude.

Jaloux ! personne ne l’était moins que lui. Non, il ne le sera jamais… Il faudrait d’autres mots… ces souffrances-là, ça ne s’est jamais vu. Je le mets dans une situation impossible, voilà tout.

Flahaut, sarcastique.

Vous n’allez pourtant pas exiger que je le plaigne ?

Claude, affolée.

Ah ! vous aussi ? Tout m’est hostile, mari, enfant, amour, amis, tout m’en veut et m’accuse. Je me suis dépensée de toutes mes forces, j’ai voulu tirer de moi tous les efforts qu’on admire, je me suis dépensée pour ce monde comme les saints le font pour l’autre. J’étais orgueilleuse, je n’estimais pas mon bonheur moins cher que leur éternité. (Changeant de ton, sarcastique.) Mon bonheur ! eh ! bien, le voilà, c’est le fiasco parfait…


Scène 4

Les mêmes, Sorrèze.
Sorrèze, son mauvais visage du dernier acte devenu le masque habituel. Cordial et sincère.

Bonjour, Claude. Je passais, j’ai voulu vous féliciter… Le prix Nobel, c’est une sanction. C’est un très beau succès.