1840
Chant de Mort d’un huron
Sur la grande montagne aux ombres solitaires,
Un jour il avait fui le chasseur ;
Son œil était de feu, comme l’œil de ses pères ;
Mais son ombre roulait avec plus de fureur !
Où guide-t-il ses pas ? quelle rage l’anime ?
Le bronze de son front paraît étinceler !
Est-ce un sombre guerrier ou bien une victime
Qu’aux mânes de son frère il brûle d’immoler ?
Il est là près du chêne : une hache sanglante
Soutient ses larges bras l’un dans l’autre enlacés ;
On dit qu’il se calma, que sa lèvre tremblante
Laissa même échapper ces mots qu’il a tracés :
« Chêne de la grande colline,
« Arbre chéri de mes aïeux,
« Écoute ! qu’à ma voix ton oreille s’incline,
« Je suis venu te faire mes adieux !
« Il m’avait dit : tes pieds ont perdu leur vitesse
« À quoi te peuvent-ils servir ?
« Ta hache est là qui pleure et maudit ta vieillesse :
« Elle sent que tu vas mourir !