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LA MÈRE SOULIOTE

 Sous leurs pieds, dans le val rocheux,
 Les guerriers de la Selléïde
 Ne cédaient au sabre homicide,
 Qu’en semant la mort autour d’eux !

« Il passe le torrent ! Le voilà qui s’avance !
« Malheur à la montagne, à nos pâles foyers !
« Là, le hardi chasseur s’appuyait sur sa lance !
« Là, retentit le son du luth des caloyers !
« Là, mes chants t’endormaient ! Mais le Turc sanguinaire
 « Nous chasse au bout du cimeterre ! »

 On entendait dans le vallon,
 Dans les airs et sur la montagne,
 Ces hautes clameurs qu’accompagne
 La voix stridente du clairon !

« Écoute ! ce sont eux ! oh ! l’étrange harmonie
« Qu’annonce la trompette aux roches de Souli ?
« Qui donc enflamme ainsi ta paupière brunie ?
« Qui donc fait que ton front, tout-à-l’heure, a pâli ?
« Enfant, ne frémis pas ! Les épaules du brave
 « N’ont jamais ployé sous l’entrave ! »

 Et la rafale, tour-à-tour,
 Mêlait le cliquetis des armes,
 Les hurlements chargés d’alarmes
 Aux sourds roulements du tambour !