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DUVIQUET

Saint-Régent. Le gouvernement rompait brutalement la trêve : il fallait en finir avec cette république de malheur ! On se grisa de projets. Kerigant parlait de soulever la garde nationale de son canton, qu’il commandait : — « il irait avec son monde au département pour avoir des nouvelles et des munitions. » Le Gris se mettrait à la tête des hommes de Saint-Gilles et de Saint-Gouëno. Sur l’avis de madame Le Gris, Mairesse courut au moulin à fouler des Loges, afin d’y prendre les paquets de cartouches cachés là, sous le toit, depuis la pacification. Il les apporta « dans un mauvais linge » ; mais les cartouches étaient humides ; pour en faire d’autres on envoya chercher du papier chez le maire de Saint-Gilles, qui livra un gros paquet d’affiches officielles ; les proclamations et les arrêtés du Directoire fournirent d’excellentes gargousses aux fusils des Chouans[1]. Les jours suivants, on connut les décrets impitoyables contre les émigrés ; la Terreur renaissait ; il fallait combattre.

Mais le coup d’État frappe à l’improviste : on n’est pas prêt ; l’émiettement des forces royalistes interdit tout mouvement d’ensemble. Le premier enthousiasme refroidi et l’heure des réflexions venue, le petit clan de Bosseny doit reconnaître que l’armée dont il dispose se réduit, au total, à rien : une vingtaine d’hommes, plus chapardeurs que soldats. Duviquet relève les courages : sa situation personnelle est nette : officier déserteur, s’il est pris, c’est la mort : il luttera donc jusqu’au dernier

  1. Le maire de Saint-Gilles-du-Mené, nommé Lemeux, était à la dévotion du châtelain de Bosseny. On allait chez lui assister à la messe des prêtres réfractaires. Archives nationales, F7 6147.