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LA MIRLITANTOUILLE

souffle ; l’émigré Lamour-Lanjégu, dont le cas est également désespéré, se range à cet avis ; Dutertre et Carfort sont tout aussi résolus. D’ailleurs Duviquet croit à la victoire : toutes les vieilles bandes royalistes, depuis le Maine jusqu’en Vendée, vont se reconstituer ; la République n’a pas d’armée à leur opposer : Hoche n’est plus là pour les vaincre ; il vient de mourir, à vingt-huit ans, sur le Rhin, frappé d’un mal mystérieux ; on a même célébré à Saint-Brieuc une fête funèbre « à l’honneur de ses mânes » et promené par les rues de la ville un cénotaphe, imité de l’antique, qu’entouraient les fonctionnaires « jouant la douleur d’une façon risible[1] ». Des hommes ? Sur un signe Duviquet aura toute sa compagnie qui tient garnison à Moncontour. On est sans argent ? Le gouvernement n’en manque pas : il suffit de le lui prendre, et l’on rejoindra Georges Cadoudal dont l’armée est forte déjà de 15 à 16.000 hommes et qui bientôt en comptera 40.000 !…

L’entraînante parole de Duviquet ne rencontra pas de contradicteurs ; seuls Le Gris-Duval et son beau-frère Kerigant auraient hésité à partager son optimisme ; mais l’intrépide madame Le Gris surtout et sa sœur étaient d’avance conquises à ses utopies. On s’explique difficilement l’ascendant que le lieutenant déserteur avait pris, en si peu de mois, sur ces femmes très honnêtes, mais, à la vérité, d’esprit singulièrement exalté et romanesque. Admis dans l’intimité des deux familles comme un frère tendrement aimé, Duviquet y était entouré des plus

  1. Geslin de Bourgogne et A. de Barthélemy, Études