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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/203

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LA MIRLITANTOUILLE

C’est l’endroit où, plus de quatre ans auparavant, Boishardy, à son premier coup de main, avait arrêté la voiture de Lamballe. Le lieu est favorable, en effet : après avoir passé le hameau de Sainte-Anne et le pont sur l’Évron, la route monte une longue côte que les diligences gravissent lentement. On prit les dispositions de combat : comme la voiture de poste était souvent accompagnée de dix à douze militaires, Duviquet divisa ses hommes en deux pelotons qu’il embusqua de chaque côté de la route. Au moment où la voiture passerait, le peloton de gauche ferait feu ; les soldats d’escorte qui n’auraient pas été atteints se porteraient infailliblement à droite de la voiture pour se mettre à l’abri d’une seconde décharge : alors l’autre peloton les abattrait. Faire en sorte de ne pas blesser les chevaux que, le coup fait, on utilisera à emporter le butin. Respecter les voyageurs : ce sont peut-être des royalistes ; mais s’il se trouve parmi eux quelque républicain notoire, pas de grâce[1]. Telles étaient les consignes.

On n’attendit pas longtemps : les Chouans, tapis dans les broussailles, perçurent bientôt au loin le roulement de la voiture. Elle est au hameau de Sainte-Anne : — elle passe le pont de l’Évron ; on entend le trot des chevaux ; donc elle n’est pas escortée : défense de faire feu. Elle ralentit, s’engage dans la montée ; Duviquet se tient prêt ; il distingue maintenant la grosse masse que tirent trois chevaux, deux aux brancards et un en flèche sur lequel est le postillon. Elle approche. La voici. — « Arrête-là, au nom du Roi ! » Des cris de surprise ; des jurons ;

  1. Archives nationales, F7 6147.