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DUVIQUET

les chevaux qui s’acculent. Tous les Chouans ont surgi de l’ombre ; le postillon met pied à terre ; le conducteur descend du siège. — « Es-tu chargé d’argent pour la République ? — Non ! » Déjà, sur l’ordre de Duviquet, ses hommes sont dans la voiture et sous la bâche ; il n’y a pas de voyageurs ; tous les colis, sacs, caisses, ballots, effets sont jetés à terre, chargés sur les trois chevaux dételés. Le postillon reçoit six livres « pour boire à la santé du Roi » ; le courrier réclame un petit sac d’écus qui est sa propriété et qu’on lui laisse, et aussi quelques caissettes de fromages de Maroilles. En remerciement il tire de son coffre une bouteille de vin qu’on débouche et qui passe à la ronde. On se sépare — « à une autre fois ! » Les Chouans tirent les chevaux chargés, s’enfoncent dans un chemin creux, laissant sur la route la voiture échouée et ses deux conducteurs déconfits.

La bande, avant le jour, retraversa Pommeret et gagna le hameau de l’Hôpital, en Quessoy, qui est une ancienne commanderie du Temple. On était là en lieu sûr. Les chevaux déchargés, Carfort et Duviquet procédèrent à l’inventaire ; chacun d’eux, muni d’un couteau, coupait les ficelles, éventrait les sacs, ouvrait les paquets et les lettres, soulevait les planchettes des caisses, fourrait dans sa poche tout ce qu’il trouvait d’assignats ou d’argent. Défense aux hommes de rien prendre. Les objets les plus divers s’entassaient, provisions de bouche ou modes de Paris, une caisse contenant des tabatières, une autre pleine de « bottines fines », une autre encore de toupets postiches et de perruques pour femmes. On jeta au feu les lettres particulières ; la correspon-