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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

décharges succèdent aux cris de Vive le Roi, vive Louis XVIII ! Car la ville est prise ; tous les postes, tous les points de résistance sont tombés simultanément au pouvoir des Royalistes. Le corps de garde de la porte de Lamballe, pris à revers, est occupé ; on enfonce les portes de la ci-devant église Saint-Guillaume et on en tire les chevaux qu’elle abrite. À la caserne des Ursulines, le jeune du Faou de Kerdaniel et J.-J. Coroller[1] entrent bravement dans la chambrée, pistolets en mains : — « Le premier qui bouge est fusillé ! » Et tous les hommes, — des vétérans et des ouvriers du génie, — hébétés par ce réveil en sursaut, se tiennent cois, tandis que les Chouans raflent les fusils alignés aux râteliers. Un vieux soldat, pourtant, reprend son sang-froid : — « Est-ce qu’on va se laisser désarmer par ces bougres-là ? » Voilà tous ses camarades debout ; une lutte s’engage. Dans la nuit noire qui enveloppe ce vieux couvent dont ils ne connaissaient pas les êtres, les royalistes trébuchent, sont refoulés. Quelques coups de fusil éclatent et du Faou, une fois dehors, masse ses hommes à l’angle de la rue aux Chèvres et de la route de Brest, se contentant de bloquer la caserne en cas d’une sortie des assiégés qui ne se montrèrent plus.

Ce qui caractérise les mille incidents dispersés de cette vaste bagarre, c’est l’indifférence des habitants de Saint-Brieuc. Peut-on admettre que, pour l’immense majorité, ils ne se réveillèrent point ?

  1. En 1814, Coroller obtint de Pénanster une attestation certifiant que, « au moment de l’attaque de Saint-Brieuc par Mercier la Vendée, il avait chargé le premier la caserne qui contenait cinq cents hommes de troupe et fait prisonnier tout ce qui tomba sous sa main ».