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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/288

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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

verse, de la place de l’Égalité à celle de la Liberté, rue Quinquaine, Grande-Rue, rue de la Charbonnerie, le Haut de Saint-Gouëno, rue Saint-Guillaume, c’est un piétinement continu de détachements, se croisant au cri de Vive le Roi ! de patrouilles conduisant au poste de la Mairie, tout illuminé de chandelles[1], quelque garde national capturé, un incessant appel de Qui vive ? clamé dans l’ombre des vieilles ruelles tortueuses, pleines de bruits confus et de chocs d’armes. Et on entend, très au loin, tinter sans relâche la cloche d’alarme de la prison.

C’est là que se jouait l’action principale, le but de l’expédition étant de délivrer madame Le Frotter et ses compagnons de captivité, près de trois cents[2], dont plusieurs condamnés à mort, des chouans, des émigrés, des prêtres réfractaires et beaucoup de prévenus de droit commun, hommes ou femmes, punis de la détention ou non encore jugés.

Située, comme on l’a dit déjà, en dehors de la ville, entre les promenades et le ravin de Gouëdic, la maison d’arrêt n’était gardée que par six gardes nationaux. À deux heures du matin, mis en éveil par le pétillement lointain des coups de fusil tirés sur la place de la Liberté, le concierge Peyrode courut à sa cloche et se mit à sonner le tocsin. Presque aussitôt, le fracas des coups de feu tirés à la porte de Lamballe, toute voisine de la prison, lui fit

  1. Chassin, Pacifications, III, p. 407, note.
  2. C’est le chiffre indiqué par le commissaire du Directoire, Denoual, dans son rapport au ministre de l’Intérieur. Archives nationales F1C III, Côtes-du-Nord, 13. Il est surprenant que l’étroite prison de Saint-Brieuc eût pu contenir un si grand nombre de détenus.