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LA MIRLITANTOUILLE

halte de deux heures. On poussa ensuite jusqu’à une lande voisine de Saint-Carreuc, et, là, Carfort prit, avec sa bande, la direction de Moncontour, afin de retrouver avant la nuit les landes de La Mirlitantouille où l’on pouvait se disperser sans danger.

Soit qu’il cherchât à dépister les Bleus qu’il pouvait croire à sa poursuite, soit plutôt que, privé de Carfort, il se fut égaré, Mercier traîna, le reste de la journée, ses femmes, ses chevaux, son canon et ses prisonniers, dans l’inextricable dédale des chemins creux. On repassa à La Saudraie et on échoua enfin au village de Launai, en Plaintel, où on décida de passer la nuit. Mais les Morbihannais bougonnèrent ; leur pudibonde rudesse s’offusquait du voisinage des femmes et, pour les rassurer, on dut expédier celles-ci à une lieue du campement ; elles trouvèrent un abri au hameau de Gourlay, dans la forêt de Lorges[1].

Le 28, à trois heures et demie du matin, on reprit la marche à travers les grands bois dépendant du château de l’Hermitage. Avant le jour on atteignait le carrefour forestier de Saint-Lambert où s’élevait une croix de granit dressée sur des marches de pierre. Une partie de la colonne, exténuée, s’arrêta là ; les plus vaillants poussèrent jusqu’au château, distant de quinze cents pas, à peine. De ce nombre furent les cavaliers, blessés ou femmes et, parmi celles-ci, madame Le Frotter que ses deux fils n’avaient pas quittée.

  1. Déclaration de Marie-Josèphe Le Perche, 22 ans, filandière, de Tréguier : — « Elle a suivi les Chouans jusqu’à la métairie de Gouray, proche la lande de Plédran, où elle a couché avec une partie des femmes, les Chouans ne voulant pas d’elles. » V. aussi Habasque, II. p. 78.