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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

comprenant que le temps des ergoteries était clos, fit humblement amende honorable[1].

Madame Le Gris-Duval, condamnée à la déportation, ne pouvait bénéficier de cette mesure de clémence ; mais on la transféra de la maison de justice de Saint-Michel à la maison de la Maternité[2] d’où elle ne tarda pas à s’évader. Son neveu, M. de Kerigant, dans ses Souvenirs[3], raconte cette évasion avec un grand luxe de détails romanesques : d’après son récit, madame Le Gris-Duval recevait souvent dans sa prison la visite du général Hédouville ; certain jour, elle l’invita à dîner avec d’autres officiers et, tandis qu’on était à table, elle quitta ses convives sous un prétexte futile, prit le costume de sa servante, sortit de la prison sans difficultés et, guidée par sa sœur, madame de Kerigant, à travers les rues de Rennes, se réfugia dans une maison où elle était attendue. Mais le général, goûtant peu la mystification, mit sur pied toute la garnison de la ville et, trois jours plus tard, seulement, les deux sœurs purent quitter Rennes en traversant de nuit la Vilaine sur une barque dont le marinier périt en les sauvant. On reconnaît dans ces péripéties la tournure d’esprit de Le Gris-Duval, qui se trouvait à Rennes à cette époque, et toujours friand de combi-

  1. « Ce qui l’afflige le plus, c’est que le délégué du gouvernement lui ait reproché d’être dur envers les prévenus. Lui, dur ! Lui qui souffre tant quand il est obligé de requérir la peine capitale ! » Lettre de Rouxel, du 18 février 1800. Rouxel est noté comme n’étant « ni un philosophe, ni un homme d’État ; il est au contraire rempli de roideur, de prévention et d’exagération ; il ne s’accorde ni avec les citoyens ni avec les juges ». 23 décembre 1799. Archives nationales, même dossier.
  2. Le 4 janvier 1800. Renseignement communiqué par M. l’archiviste départemental d’Ille-et-Vilaine.
  3. Les Chouans, p. 94 et suivantes.