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Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/57

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BOISHARDY

quoique régicide, l’âme droite et compatissante ; déjà bien des cachots s’étaient ouverts à son passage en Bretagne[1]. Chacun d’eux méprisait l’autre ; Bollet traitait d’histrion Boursault, qui le qualifiait d’imbécile. De ces législateurs et de leurs collègues, Hoche, dédaigneux, disait, en mettant la main sur son épée : — « Croyez-vous que ce soit pour de semblables J…-F… que je porte cela[2] ? » Seule unissait députés et généraux la crainte d’un soulèvement simultané de tous les chouans bretons, angevins, manceaux, normands, qui, conduits par un prince français, s’unissant aux Vendéens de Charette, aux soldats de Stofflet et, peut-être à des troupes étrangères amenées par vaisseaux anglais, auraient vite eu raison des bataillons indisciplinés et des gardes nationaux indécis dont se composait, dans l’Ouest, la débile armée de la République[3].

Il faut se résigner à l’évidence : en cet automne de 1794, les royalistes sont maîtres de la Bretagne, d’autant plus redoutables qu’on ne peut les atteindre. Hoche, à la tête d’un petit corps de troupes, entreprend une tournée dans le pays, pousse jusqu’au fond du Morbihan ; il écrit : — « Nous voyons à chaque instant les sentinelles des brigands ; marchons-nous dessus ; tout disparaît ; il ne reste aucun vestige… On dirait qu’ils ont des télégraphes. » Paris s’émeut et voit déjà les chouans en grands

  1. Sur Bollet, voir les pages charmantes de madame de La Villirouët, Souvenirs, publiés par M. le marquis de Bellevue.
  2. Souvenirs vendéens, par A. de Béjarry, cité par Welschinger, Aventures de guerre et d’amour du baron de Cormatin, p. 76, n.
  3. Bollet écrivait au Comité de Salut Public : — « Je n’ai jamais vu d’armée où il y ait tant de désordre et si peu de subordination. » Chassin, Pacifications, I, 53 n.