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LA MIRLITANTOUILLE

lence et se retirent. Comme ils sont en route pour regagner la ville avec la troupe, Boishardy surgit d’un fourré, interpelle le commandant Dubreuil, proteste vertement contre cette audacieuse infraction à la convention du 3 janvier et menace de déposer plainte. Sévir contre mademoiselle de Kercadio c’est rompre la trêve et, dans ce cas, on peut « s’attendre à des surprises » ; il n’a pas licencié ses hommes et il est résolu à livrer bataille si la troupe reparaît à la Ville-Louët pour mettre la jeune fille en arrestation[1]. Il adresse le lendemain semblable ultimatum aux administrateurs du département, non cependant sans proposer d’effectuer en assignats vérifiés le paiement des marchandises en dépôt chez la citoyenne Le Landais. C’est, sans doute, cette transaction qu’adoptèrent les magistrats briochains, car les domestiques inculpés bénéficièrent d’un verdict d’acquittement[2].

Mais le duel se poursuivait entre Boishardy et Besné, et celui-ci ne désarmait pas. Il avait adressé un rapport de l’affaire au Comité de Sûreté Générale, concluant que « la Kercadio était justiciable du tribunal révolutionnaire de Paris ». — Je ne compte pas avec la loi, écrivait-il, et celle de 23 août 1793 est impérieuse… On m’assassinerait, plutôt

  1. P. Hémon, Le comte du Trévou, p. 66. — « Au surplus, ajoutait Boishardy, si les commissaires veulent entendre ses raisons, il les recevra, à 9 heures du soir, dans une maison située sur la route de Moncontour à la sortie de Lamballe. » Deux officiers du 60e régiment de ligne et l’agent national du district se présentèrent au rendez-vous. Boishardy arriva « avec quatre camarades ». Il déclara se porter garant de l’innocence de mademoiselle de Kercadio : « les assignats faux ont été introduits à la Ville-Louët par un déserteur qui courtise une servante du château et c’est à cette fille qu’étaient destinés les robes et objets de toilette. »
  2. Archives nationales, D111 58.