Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/140

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savait, voulait que la Fête fût grandiose et qu’elle effaçât, par ses splendeurs et sa nouveauté, le souvenir de toutes les pompes de la royauté[1]. Aussi était-ce à l’Incorruptible qu’allait la reconnaissance du peuple de Paris, d’avance émerveillé, satisfait surtout de cette prodigalité où trouveraient à gagner tous les genres de commerce et tous les corps de métier. Pour la première fois depuis le début de la Terreur, une sorte d’accalmie, de détente, résultait de l’activité des affaires : certes, l’échafaud ne chômait pas non plus et, chaque jour, les charrettes du bourreau promenaient à travers les rues un nombreux contingent de victimes ; mais à cette horreur on était accoutumé au point qu’elle ne répugnait plus. Pourquoi, d’ailleurs, se serait-on intéressé aux conspirateurs dont il fallait bien que la République se débarrassât ?

L’histoire de la Révolution, telle qu’elle est établie par d’éminents érudits, experts à étudier et à critiquer les textes, présente un grand défaut : elle ne nous peint jamais le peuple, personnage dont on parle tout au long du drame, mais qui reste presque toujours dans la coulisse et ne paraît sur la scène que quand on l’y traîne. Non point la masse de demi-bourgeois, de boutiquiers, de petits employés, qui vont le soir à la section, se casent dans les comités locaux, écoutent la lecture des gazettes et croient se faire une opinion à entendre pérorer les beaux parleurs de quartier ; mais le peuple des

  1. Les mémoires concernant la montagne du Champ de Mars se trouvent principalement dans les cartons F4 1017 et 2090, aux Archives nationales. L’un de ces mémoires contient quelques croquis sommaires de la colonne, du sarcophage, etc.