Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/165

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rois, elle répliqua, avec une sorte d’exaltation : « Je verserais tout mon sang pour en avoir un ; voilà mon opinion ; vous êtes des tyrans[1]. »

Au Comité, elle déclara se nommer Anne-Cécile Renault ; elle avait vingt ans, vivait chez son père, papetier, dans la Cité, rue de la Lanterne, à l’angle de celle des Marmousets, près le pont Notre-Dame. Elle subit l’interrogatoire d’une contenance assurée et un peu rogue, alléguant qu’elle voulait connaître Robespierre « pour savoir s’il lui convenait » et « comment est fait un tyran ». Vadier devait être là, car parmi les questions posées à Cécile, on remarque celles-ci : « Connaissez-vous la rue Contrescarpe ? Dom Gerle ? Catherine Théot ? » Le vieil inquisiteur cherchait à grossir son rapport en germe, jusqu’alors assez peu nourri ; mais la petite Renault n’avait jamais entendu ces noms-là. Une femme qui se trouvait au Comité en solliciteuse, la fouilla et trouva sur elle deux petits couteaux de poche : l’un en écaille, l’autre en ivoire garni en argent. L’interrogatoire prenant fin, elle observa que, en allant rue Saint-Honoré, elle avait déposé en route un petit paquet de linge au café Payen, contre la Convention. Didiée et Châtelet coururent l’y chercher : elle ne fit aucune difficulté pour convenir qu’elle s’était munie de ce bagage pour ne pas manquer de linge « là où on allait la conduire ». – « De quel lieu entendez-vous parler ? – De la prison, pour aller de là à la guillotine. »

À onze heures du soir, elle était écrouée à la Conciergerie ; une heure plus tard, Héron arrêtait

  1. Moniteur, réimpression, XX, 580 et Archives nationales W 389.