Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/234

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de salut public aidera peut-être à comprendre certains épisodes mal connus ou volontairement tenus dans l’ombre par les contemporains. Les membres des Comités de gouvernement prenaient grand soin de tenir secrètes leurs dissensions : chaque fois que l’un d’eux parlait à la Convention, il vantait le touchant accord des délibérations et la parfaite union entre le Comité de salut public et celui de sûreté générale. Ils gagnaient à cette comédie la prorogation mensuelle et, par suite, la pérennité de leur importance. Il n’y avait plus pourtant à s’illusionner ; la rupture était imminente, et les rares qui n’avaient pas perdu tout sang-froid en diagnostiquaient déjà les symptômes.

Au nombre de ceux-ci fut Payan, l’un des plus chauds robespierristes : ancien officier d’artillerie, démissionnaire en 1790, nommé, en 1793, administrateur du département de la Drôme et envoyé, à ce titre, en mission à Paris, il plut à Robespierre qui lui donna la succession de Chaumette et le fit agent national de la Commune. De famille honorable et aisée, de belle tenue, intelligent et actif, Payan, aveuglé par son culte pour Maximilien, s’efforçait de surpasser celui-ci en jacobinisme. Il avait, en germinal, interdit la représentation du Timoléon de Chénier, cette tragédie mettant en scène « des rois honnêtes et des républicains modérés ». « Belle leçon à présenter au peuple ! écrivait-il, indigné, beaux exemples à lui donner[1] ! » Or, dans les premiers jours de messidor, Payan adressait à Robespierre une lettre confidentielle, le conjurant de ne

  1. La lettre originale est au Musée des Archives nationales.