Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/290

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même qu’elle pactise avec l’ennemi : « l’Angleterre, tant maltraitée dans nos discours, est ménagée par nos armes. » La France, objectera-t-on, est victorieuse ; Robespierre dénigre la victoire : « elle ne fait qu’armer l’ambition, endormir le patriotisme, éveiller l’orgueil et creuser de ses mains brillantes le tombeau de la République ! » Et ces maximes consternantes sont coupées d’apostrophes idéalistes : « Non, Chaumette ; non, Fouché, la mort n’est pas un sommeil éternel ! » ou d’épanchements révélant toute l’amertume d’un cœur qui se croit tendre et n’est qu’ulcéré : « Ils sont arrivés à me charger de toutes leurs iniquités, de toutes les rigueurs commandées par le salut de la Patrie… ! » « Tout homme qui s’élèvera pour défendre la morale publique sera accablé d’avanies et proscrit par les fripons. » Conclusion : secouer le joug des Comités, les épurer, c’est-à-dire en exclure tous les scélérats hostiles à Robespierre, et « constituer l’unité de gouvernement sous l’autorité suprême de la Convention[1] ».

Ce que la postérité doit retenir de ce discours, c’est le tableau lamentable qu’on y trouve de la situation du pays après trois ans de Révolution : « l’intrigue et l’intérêt triomphants » ; « tous les vices émancipés » ; la Patrie « partagée comme un butin » ; le monde « peuplé de dupes et de fripons » ; la vertu « suspecte et dénigrée » ; l’Administration « fomentant l’agiotage », dépouillant le

  1. Le discours prononcé, le 8 thermidor, par Robespierre, à la Convention, n’a pas été reproduit par le Moniteur ; il a été publié en brochure, un mois plus tard, d’après des brouillons trouvés chez Robespierre, brouillons couverts de ratures et de renvois, ce qui explique les répétitions qu’on y trouve.