Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

foule d’officiers de tous grades et de toutes armes. Héron se faufila parmi cette cohue, parvint jusqu’à Hanriot qui pérorait dans un salon encombré de militaires, et, à haute voix, il communiqua les décisions du Comité au général qui, pour toute réponse, désignant « d’un geste de sultan » aux braves qui l’entouraient, l’audacieux émissaire de la Convention et ses compagnons : « Je vous ordonne de tuer ce scélérat dans l’instant, et la Patrie sera encore une fois sauvée. C’est aujourd’hui que… trois cents scélérats de la Convention doivent être exterminés. Il y a assez longtemps que les patriotes sont dans l’oppression et que les coquins les font incarcérer pour protéger les nobles et les prêtres !… » Sa péroraison fut frénétique : « Poignardez-le ! Poignardez-les tous les trois ! Que je sois délivré dans l’instant ! » Les aides de camp, sabres au clair, se précipitaient ; mais Hanriot s’était jeté sur Héron, lui serrant la main en vieil ami et l’embrassant tendrement, désirant qu’on ne se quittât plus[1] ; puis, réprimant sa sensibilité, il passa dans la pièce voisine et reparut un papier à la main : « Tu mérites la mort, décréta-t-il ; je t’envoie en prison ; ton jugement sera rendu demain. » Héron et ses deux acolytes furent conduits sous bonne garde au violon de la rue du Bouloi.

C’est, sans conteste, à ce moment que Hanriot apprend l’arrestation de Robespierre, car il monte à cheval, et, suivi de quelques aides de camp, au nombre desquels le marchand de bas Deschamps, l’éphémère châtelain de Maisons-Alfort, il se lance

  1. « Tu resteras avec nous ; je te mets sous la sauvegarde de la force armée ici présente. » Rapport de Héron.