Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/326

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cervelle !” ». C’est à ce moment que Dulac et ses hommes, sabre en main, sont parvenus à fendre la presse et à pénétrer dans la salle de la Commune : une trentaine de municipaux y sont encore, « médusés », et se laissent prendre sans résistance[1]. Dulac poursuit jusqu’au Secrétariat par le couloir anfractueux qui y conduit, engorgé d’un entassement humain, mêlée confuse de cris, de bourrades, de coups, de poussées. Du seuil du salon, il voit Robespierre gisant, « près de la table », sous laquelle est caché Dumas qui roule entre ses doigts un flacon d’eau de mélisse.

L’Hôtel de ville est au pouvoir des hommes de la Convention. Dans toutes les galeries la chasse aux rebelles se poursuit en une indescriptible confusion : on ne sait qui est pris et qui échappe : Saint-Just, toujours impassible, à peine décoiffé, se livre sans un mot[2]. Hanriot a disparu ; un certain Laroche, compagnon peintre, escaladant le grand escalier, voit un homme qu’un autre emporte sur son dos et abandonne en haut des marches, comme un paquet compromettant : c’est Couthon. Laroche l’interpelle : « Tue-moi », dit l’infirme. L’ouvrier refuse : « Alors, supplie Couthon, mets-moi dans le petit escalier qui est là… » Laroche l’y pousse et reste auprès de lui : « Monte-moi un étage plus haut », gémit Couthon. Il fait très sombre dans le réduit où l’a traîné Laroche et celui-ci ne quitte pas son prisonnier. Durant une heure, le podagre angoissé guette tous les bruits : il voudrait savoir

  1. Anecdotes relatives au 9 thermidor. Déclaration de Dulac.
  2. Éd. Fleury, Saint-Just et la Terreur, II, 364, et Anecdotes de Dulac, citées plus haut.