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derrière les vieux murs en ruines

mouton, je trouve un vieillard, Si Bouchta, gardien du lieu, qui égrène son chapelet.

— Je voudrais voir Zeïneb, épouse de Kaddour le mokhazni. Est-ce possible ?

Le vieillard s’exclame : tout n’est-il pas permis à la femme du hakem ? Ma présence sera, pour la maison, une bénédiction. Bienvenue ! Bienvenue !

Il met la main sur son cœur, s’incline, multiplie les compliments et m’introduit dans le patio.

C’est une cour comme une autre, délabrée, mal entretenue, mais qui n’a rien de particulièrement sinistre. Des cotonnades grisâtres, des loques déteintes et sans âge, flottent devant quelques portes.

L’épouse du gardien, toute petite, toute ratatinée, toute cassée, m’introduit dans une chambre pleine de femmes aux visages nus, parmi lesquelles Zeïneb, enveloppée de son haïk, garde une allure de pudique bienséance.

— Tu viens de la part de Kaddour ? interrogea-t-elle d’une voix implorante, soumise, altérée par cette ardente tendresse que les brutalités de son époux réveillent toujours en elle.

— Kaddour t’attend…

Je n’ai pas besoin d’évoquer le collier ; Zeïneb est déjà dans la cour, pressée de rejoindre le cruel amoureux qui règle avec Si Bouchta les formalités de son départ.