à les observer de loin. Je la vois encore sur le divan, où elle s’était assise près de lui, dans une pose où le diable et le bon Dieu, je ne sais comment, s’entendaient, l’enlaçant de ses regards, le pénétrant de ses paroles, à la fois enivrantes et chastes, — car elle s’est faite chaste pour lui. En le quittant, au bout d’une heure, qui fut mortelle pour ses soupirants, elle se leva languissante, rêveuse, abandonnant son bouquet. Paolo le lui rapporta.
« — Acceptez-en du moins cette fleur, lui dit-elle, comme souvenir d’un entretien qui me laisse, moi, plus qu’un souvenir. »
« Que devait faire Paolo ? Lui porter le lendemain, en échange de la fleur, un autre bouquet. C’est ce qu’il fit, à l’heure où elle recevait tout le monde, et en se promettant de rendre sa visite courte. Cependant il resta jusqu’au soir ; il y retourna le lendemain, et maintenant cette femme le possède tout entier ; il n’entend, il ne voit qu’elle, et n’existe plus pour ses amis. Aux heures même si rares où il se donne à nous, il est distrait, il répond à peine. Foin de l’amour qui nous absorbe à ce point ! je le préfère plus léger et plus aimable. »
Quatre heures étaient sonnées. Affaissé dans son fauteuil, pâle et défait, Ali semblait ne plus songer à partir. La porte s’ouvrit tout à coup, et Paolo, entrant avec impétuosité, se jeta dans les bras de son ami.
« Quelle douce et chère surprise ! Mais pourquoi ne pas m’avoir prévenu ? Je t’aurais reçu à l’arrivée ; je serais allé au devant de toi ! Ton premier pas dans ma ville n’eût pas été solitaire. Ah ! cher enfant, comme tu es pâle ! Et ta main tremble ! Tu