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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/164

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les préventions qui pourraient s’élever en toi, de t’expliquer tout, de te dire enfin ce que l’écrit ne peut dire. Et surtout, mon ami, tu la verras, tu l’entendras, et dès lors tu comprendras tout…

« Déjà tu l’as deviné, mon Ali, j’aime, et il ne s’agit pas ici d’un vulgaire amour. J’aime un être aussi plein de grandeur que de charme, et qui m’élève à des puissances nouvelles. Si ardent que soit cet amour, n’en conçois aucune crainte pour notre amitié. Le véritable amour ne stérilise pas, il féconde, et mon cœur, plus vaste et plus tendre, ne t’en aime que mieux. C’est au point, vois-tu, que parfois ma joie déborde !… Je me sens trop heureux, et, pensant alors à tous les souffrants de ce monde, surtout à ceux qui vivent sans amour, je me dis : — Qu’ai-je fait pour être ainsi comblé de bonheur et pour vivre dans cette lumière, tandis qu’ils vivent dans cette ombre ? — Et je voudrais les consoler tous et souffrir pour eux. Je n’ai jamais été si bon, je te jure. Bénis-la donc avec moi ! C’est une de ces femmes contre lesquelles vous avez en France encore des préjugés, mais qui, dans notre Italie, sont prêtresses du Dieu vivant, de l’art éternel. Sa voix prend nos cœurs et les élève. Tout le monde ici l’adore. Tu as entendu son nom déjà célèbre ? la Rosina !

— Oui, dit faiblement Ali.

— Je ne regrette qu’une chose, l’éclat même de cet amour envié de tous ; car plus le sentiment est profond, plus il aime à s’envelopper de voiles. Ce public enthousiaste, j’en suis jaloux ; la voudrais toute à moi… Mais je me dis ensuite que ce serait un crime de placer mon égoïsme entre ce