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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/198

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La coque renversée d’une barque tirée sur le sable, en obstruant leur chemin, arracha Paul à sa rêverie. Il s’arrêta, se fit un siége de la barque et fit asseoir Ali près de lui. Le flot clapotait à leurs pieds. À quelque distance, dans les arbres d’une villa, un rossignol préludait, tandis qu’au loin, du coteau voisin arrivait affaibli le cri douloureux de l’orfraie.

« Ali, dit tout à coup Paolo, crois-tu vraiment que l’amour soit plus vrai entre des êtres plus différents ? qu’il y faille ce contraste que tant d’esprits admirent et préconisent ? Ces deux êtres, l’homme et la femme, que la nature condamne à ne pouvoir vivre l’un sans l’autre, sont-ils vraiment tenus d’être dissemblables au point, hélas ! de ne pouvoir se comprendre ?

— Ta question se répond à elle-même, dit Ali. Non, cette philosophie me paraît absurde ; elle s’appuie sur une autre base que la recherche du vrai.

— Certes, reprit Paolo, je conçois un état supérieur à cet état d’incompréhension où en se cherchant l’on se heurte ! Je conçois un état bien supérieur où, moins agité, l’amour n’en serait que plus profond ; où des affinités puissantes, une entente sérieuse, une confiance entière, lui donneraient à la fois plus de grandeur, plus de charme, et plus de sécurité. »

Il attendit une réponse ; comme elle ne vint pas, jetant le bras autour de son compagnon :

« Ne serait ce pas aussi ton rêve, Ali mio ?

— Oui, répondit Ali d’une voix faible, mais vibrante d’accent, note formée aux profondeurs de l’âme.