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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/261

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Quel nom donner, en effet, à ce charme si puissant, libre des inquiétudes et du trouble d’un autre amour, qui remplissait leur âme de délices, lorsque, appuyés sur le sein l’un de l’autre, échangeant parfois un long baiser, ils savouraient en silence la joie de s’aimer ?

Cette joie, chez Ali, était aussi sereine qu’éclatante ; mais elle n’était point exempte, chez Paul, d’étonnement, de trouble mème. Il se sentait pénétré par des influences inexplicables. Il lui semblait vivre parfois au sein d’un enchantement, pareil à ceux des légendes… Par quelle magie ne pouvait-il détacher ses yeux de ces traits chéris, où chaque jour il découvrait une beauté, des grâces plus exquises ? D’où venaient tant de persuasions sur les lèvres de ce jeune ami ? dans sa voix de tels accents, qui remuaient l’âme dans ses profondeurs ?… Un si pur attachement pouvait-il avoir, ainsi qu’une autre passion, ses exagérations, sa folie ?… Oui, toute grande affection, sans doute…

Et puis, cet Ali, cet enfant si chaste, si noble, si réfléchi, si courageux, si peu semblable aux autres hommes, n’était-ce pas un être à part ? En faire un demi-dieu, pour Paul, était bien facile, et son hésitation ne fut pas longue. Par cette affection sans pareille, Ali le transportait en des mondes nouveaux. Il accepta le miracle. Tout ce qu’il y avait en lui d’enthousiasme, de mysticisme et d’exaltation prit l’essor dans ce noble et étrange amour, et, sans bien comprendre, il adora.

Plus d’une fois, recueilli dans une méditation inquiète, ou frappé tout à coup d’un geste, d’un son de voix, agité encore par le souvenir de la scène du