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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/263

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de cet ébranlement formidable, que mouvements sourds, trépidations, craquements, un émoi, une agitation immenses. On eût dit que ce grand signal avait partout réveillé la vie. Débarrassée d’une partie de son lourd manteau, la montagne tressaillait, de la cime à la base, au souffle de l’air libre, et ses échos, encore enroués, s’essayaient à répercuter en murmures les tonnerres de l’avalanche.

« À présent, messieurs, quand partons-nous ? » demanda Favre au souper.

Les deux jeunes gens se regardèrent. Cette question si simple venait de bouleverser en eux tout un monde, formé déjà, de chères habitudes. — Avaient-ils donc accepté pour définitive demeure ce pauvre chalet ? Assurément, ils n’y avaient pas songé ; cependant ils sentirent, à ce moment, qu’aucun autre lieu dans le monde ne leur serait intime et cher comme celui-ci. Ils ne répondirent pas à Favre, et tombèrent l’un et l’autre dans la rêverie.

Le lendemain, ils se dirigèrent ensemble du côté de l’avalanche, et tandis qu’ils considéraient cette immense et froide ruine, qui allait bientôt porter la fertilité dans les chaudes régions, Paul, s’adressant à son ami, répéta la question de Favre.

« Qu’en dis-tu ? devons-nous partir maintenant ? »

Dans cette question, aucune idée de séparation n’était contenue, et cependant l’émotion d’Ali fut visible. Il rougit, baissa sur ses yeux humides le voile de ses paupières et balbutia :

« Nous ferons ce que tu voudras

— Restons ! s’écria Paul. Et moi aussi, je t’assure, je souffrirais de partir. Nulle part je n’ai tant vécu ; nulle part je ne t’ai si bien aimé. Ailleurs comme