Page:Leo - Aline-Ali.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tre, quand après de longs épanchements tu m’attirais dans tes bras, ou quand la tête chérie se reposait sur mon sein ? Alors je penchais aussi ma tête sur la tienne ; j’appuyais mes lèvres sur ton front ; nos cheveux se mêlaient ; mon sein, en se soulevant sous ton poids, se sentait avec délices pressé par toi ; je recevais chaque battement de ton cœur. Tu étais ainsi plus que mon frère, tu étais bien mon amant ; tu étais plus encore peut-être, et m’inspirant de toutes les tendresses de ce monde pour les verser sur toi, je t’aimais encore de la plus haute et la plus profonde, l’amour maternel. En ces moments, la parole était impuissante ; nous demeurions silencieux, nous voyant penser, nous laissant vivre d’une immense vie, portés sur l’océan de l’amour infini. Après de telles joies, que rêver ? Où veux-tu descendre ? Nous avons habité l’alpe blanche des pures amours, nous avons respiré l’air des hautes cimes, et tu voudrais nous ramener dans l’atmosphère écœurante des plaines, au milieu des miasmes d’une foule impure ?…

Oui, j’aurais toujours gardé mon secret, bien que j’eusse prévu d’avance de grandes souffrances près de toi. Notre amitié, qui était bien pourtant un amour, ne t’eût pas suffi sans doute… Je m’efforçais d’accepter d’une autre pour toi ces joies de famille, que je renonçais à t’offrir ; mais quelles amères jalousies !… Et maintenant encore… oui, je l’avoue avec toi, il y aurait là quelque chose d’odieux, d’insensé… Mais quoi ? toute voie tracée dans l’erreur aboutit à la souffrance. Oh ! c’est bien d’amour que je t’aime, va ; mais d’un amour qui ne ressemble en rien à celui des autres, et qui s’offenserait de lui res-