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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/31

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fille était devenue chez sa sœur une puissante énergie ajoutée à cette passion.

Belle de tout le développement de ses charmes, la lèvre amère, ironique, ardente, l’œil sombre, traversé de flammes, déjà Mme de Chabreuil semblait renfermer dans son sein gonflé, soulevé par une respiration irrégulière, les épreuves de toute une vie. Ce cercle bruni sous l’œil avait reçu plus d’une larme, et ce beau front aux lignes bombées avait sa ride entre les sourcils.

Après avoir enlacé d’une vive et fiévreuse étreinte son père et sa sœur, elle était retombée sur les coussins, toute pâle.

M. de Maurignan était trop observateur, et d’ailleurs trop averti, pour attribuer à une simple indisposition l’état de sa fille ; aussi fit-il des demi-questions, que gracieusement elle éluda. Était-ce une de ces créatures fiévreuses que tout agite ? ou bien su. bissait-elle une violente crise intérieure, dont elle ne pouvait contenir l’ébranlement ?

Femme du monde, quoi qu’il en fût, elle n’abandonna pas le soin d’être aimable, et soutint la conversation avec une verve un peu saccadée, mais en même temps avec une effusion de tendresse qui se révélait moins par ses paroles que par ses regards, et leur donnait une puissance magnétique extraordinaire. On eût dit que son cœur se versait en effluves. Évitant, contre le gré de ses interlocuteurs, de parler d’elle-même, elle maintenait l’entretien sur eux seuls, sur leurs projets, sur leurs espérances, et cependant répondait à peine à ce qui était dit de Germain, comme si ce sujet lui eût inspiré quelque répugnance.