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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/316

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bleus ; là se dresse, étrange et triste, un donjon féodal ; un vieux clocher branlant découpe sur le ciel bleu ses ogives et son beffroi vide, tandis que de la cage d’ardoise des sveltes clochers modernes s’échappent dans l’air lumineux des sons argentins.

Ce large et beau fleuve, ce terrain propre et sablonneux, ces rochers, ces murs garnis de feuillages, la verdure et la vie, de toutes parts exubérantes, emplissent les yeux de fraîcheur et de gaieté ; au sein d’un tel luxe de la nature, la misère humaine, si le souvenir importun en peut même frapper l’esprit, semble un mal réservé à d’autres contrées.

Là aussi pourtant, sous ce manteau d’abondance et de grâce, elle se cache. Elle se cache, et même s’enfouit. Sous le terrain nourricier, formé par la chute des feuilles et des hommes, — car ce gracieux et fertile Anjou est un champ de bataille séculaire, — s’étend comme assise le calcaire tendre appelé tuf, qui, facilement détaché de la carrière en blocs taillés au ciseau, durcit à l’air, et s’emploie à la construction des maisons blanches, dont sont bâtis ces riants villages. Mais le hameau, la ferme, la cabane elle-même, manquent au paysage. D’un village à l’autre, au milieu de terres soigneusement cultivées, de beaux vergers, par des chemins fréquentés, parmi tous les signes d’une vie rurale active, on traverse de longs espaces, sans apercevoir que rarement les centres naturels de cette activité, c’est-à-dire des habitations humaines.

Les noyers, les ormes, de grands chênes au port majestueux, semblent par moments les seuls maîtres de ces campagnes ; et cependant voici l’attelage rustique, chargé de foin ou de gerbes. Où se rend-il ?