Page:Leo - Aline-Ali.djvu/34

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— Tes ennuis intérieurs, dit M. de Maurignan avec un peu d’hésitation, cette absence d’autorité dans ta propre maison, ta gêne, tout cela est le résultat inévitable de ta mésintelligence avec ton mari, et s’il était possible de rétablir quelque union entre vous… »

Suzanne se releva brusquement, quittant l’épaule de son père, où elle était appuyée.

« Ah ! vous pensez ? dit-elle avec une inflexion de voix stridente, méprisante, amère.

— Que veux-tu, ma fille ? Cet homme a contre toi toute puissance et…

— Je le sais, » dit-elle d’un ton sec et ferme.

Aline rentrait avec son neveu.

« Nous reprendrons cette conversation demain, » dit à demi-voix M. de Maurignan à Suzanne.

Celle-ci ne répondit pas. Elle s’était rejetée de l’autre côté, sur son siége, et travaillait par un violent effort à se calmer. Bientôt ses yeux redevinrent secs et brûlants.

Tout joyeux d’être délivré de l’étude, Gaëtan se jetait dans les bras de son grand-père.

« Quel ours que ce précepteur ! murmura Aline à l’oreille de la marquise.

— Tu venais de ma part, » dit celle-ci.

L’enfant justifiait assez par son apparence débile les craintes de sa mère. C’était un garçon d’une dizaine d’années, joli, fin, les yeux pleins de malice et de vivacité ; mais pâle, fluet, la poitrine creuse, le dos arrondi. Il ne lui eût fallu pour le moment d’autre étude celle qui se prend à la volée dans les champs, semence divine d’ailleurs, et, même pour l’esprit, autrement féconde que l’analyse éter-