Aller au contenu

Page:Leo - Aline-Ali.djvu/359

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de joie. Puis, mille sentiments nouveaux l’agitèrent. De tout son cœur elle désirait lui parler, et n’osait plus. Elle sentait le besoin de le consoler et…

« Ah ! trêve d’enfantillages ! se dit-elle, en se levant tout à coup. Veux-je le sauver ou le perdre ? L’aimé-je ou non ? Je l’aime ; il souffre ; et ma volonté ne serait pas supérieure à tout !… Je veux qu’il soit heureux, et il le sera, dussé-je être mille fois plus forte que moi-même ! »

Onze heures sonnaient. Tout dormait dans le château ; d’un pas rapide, Aline traversa la chambre… et tout à coup, devant une glace, elle s’arrêta brusquement à se voir dans ce désordre, ces belles épaules nues, ce sein à demi voilé, ce visage éclatant par tant d’émotions, d’une beauté splendide, elle éprouva un frémissement, un émoi mêlé de honte et d’orgueil, et ses paupières se baissèrent. Mais presque aussitôt elle les releva :

« Il a raison, se dit-elle ; cela est sublime, la beauté ! Ne suis-je pas heureuse d’être belle… pour lui ? »

Et cependant, tandis qu’elle passait à la hâte, et d’un mouvement fébrile, un long peignoir blanc, elle semblait frémissante encore ; des ombres et des lueurs se succédaient sur ses traits. Elle appuya fortement une main sur son front, l’autre sur son cœur ; puis, d’un visage empreint de résolution, elle ouvrit la porte et sortit. Un pâle crépuscule régnait dans le vaste corridor, où, sans lumière, elle glissait d’une démarche ferme et majestueuse, avec aussi peu de bruit que sa blanche robe sur les dalles. Elle arriva ainsi jusqu’à la chambre de Paul, et doucement, sans frapper, entr’ouvrit la porte.